Alors que je commençais ce texte consacré à la Macronie et son irrésistible fuite en avant dans la négation du réel, voilà que j’apprends que notre farfelu président veut vendre cent Rafale à l’Ukraine. Ce serait drôle si ce n’était pas aussi grave. Mais il s’agit là d’une véritable démonstration du caractère totalement déconnecté et nihiliste du macronisme. Le réel n’existe littéralement plus, on le change par des discours et des postures de communicant. Pourtant cette annonce devrait immédiatement faire sourire n’importe quelle personne un peu intéressée aux questions géopolitiques, militaires et économiques. D’une part la France est totalement incapable de fournir cent Rafale. Ce sont des avions coûteux et très long à produire et, depuis des années que nos armées ont été taillées comme des bonzaïs, les capacités de production se sont adaptées à ces armées miniatures. Nous n’avons simplement pas les moyens humains pour produire ces avions dans un délai raisonnable au sens de la guerre en Ukraine actuelle.
À moins que Macron ne cherche à déshabiller l’armée française pour fournir rapidement l’Ukraine ce qui ne m’étonnerait absolument pas de la part de ce triste personnage. Après tout, Macron a déjà prouvé à de multiples reprises que l’intérêt de la France était très secondaire pour lui, surtout lorsque son image médiatique pourrait pâtir d’une défense de l’intérêt national. Mais si l’on se place d’un point de vue militaire, c’est tout aussi absurde. Même cent rafales ne pourraient inverser le cours de la guerre. L’Ukraine a perdu, que l’on soit critique ou pas de l’action russe, que l’on soutienne ou pas l’Ukraine n’a aucune importance, factuellement ils ne peuvent que reculer et perdre. Plus l’Ukraine attendra avant de négocier, plus il y aura de morts, et moins elle pourra sauvegarder sa souveraineté ensuite. L’action que vient de faire Macron n’est donc qu’une escroquerie pour les Ukrainiens qui vont se retrouver à devoir commander des avions qui arriveront trop tard et qui n’auront de toute manière aucunement la possibilité d’inverser la situation. Le coup de l’arme magique qui était censé inverser une guerre on connaît ça. L’Allemagne nazie avait fait la même chose avec les missiles V2, on connaît la suite. La guerre dans le monde réel ce n’est pas un film hollywoodien, on ne gagne pas à la fin grâce à une arme magique sortie de la tête d’un savant fou.

Enfin d’un point de vue économique c’est absurde. L’Ukraine est en ruine, ce pays a perdu un tiers de sa population, et il ne faudra probablement pas compter sur son retour après la guerre. Les Ukrainiens installés en Russie, en Allemagne ou en Pologne auront sûrement refait leurs vies et ne trouveront probablement aucun intérêt à rentrer un jour au pays. Surtout que ces pays en question manquent de main-d’œuvre parce qu’ils sont vieillissants et qu’ils feront tout pour garder cette population. On peut d’ailleurs se demander si l’Allemagne et la Pologne n’avaient pas surtout cette transfusion de population en tête lorsqu’ils ont alimenté cette absurde guerre, mais c’est un autre débat. De fait, l’Ukraine aura du mal à se remettre de la guerre, d’autant que la natalité est catastrophique. L’UE sera mise à contribution, les USA se lavant les mains du conflit qu’ils ont en grande partie provoqué comme d’habitude. Bref, on ne voit pas comment l’Ukraine pourrait payer, c’est même criminel de penser ça alors que la priorité du pays après-guerre sera d’abord de reconstruire les infrastructures détruites. Si l’on suit la logique comptable, c’est en gros les Français et les européens qui achèteront à coup d’aide ces fameuses Rafale qui ne serviront probablement jamais à rien, enfin s’ils arrivent un jour à destination.
On peut donc légitimement se demander s’il n’y a pas derrière ces accords une affaire de simple enrichissement privé qui se fait sur le dos des Français et des Ukrainiens et pas grand-chose d’autre. Car tout ceci n’a aucun sens ni du point de vue militaire, ni du point de vue politique, ni du point de vue économique. À la limite on peut y voir simplement un coup de communication comme le fait régulièrement Macron depuis qu’il est malheureusement pour nous au pouvoir. Mais cela révèle aussi comme je l’ai dit une déconnexion totale du monde réel. Emmanuel Todd nous a rappelé dans son dernier livre et dans ces multiples interventions à quel point la disparition des croyances collectives avait laissé des individus esseulé et apeuré. Sans une croyance collective forte, l’individu semble incapable d’affronter l’adversité et peut tomber dans de nouvelles formes de croyances dont certaines se révèlent dangereuses. Il a aussi souligné que cet effondrement des croyances et des valeurs entraîne aussi une capacité à rompre avec le réel et à tomber dans une forme de nihilisme. En ce sens, il est de plus en plus clair que Macron est la forme qu’a pris le nihilisme en France.
Cela se voit sur l’affaire ukrainienne et sur l’incapacité de nos élites à avoir une image réaliste du conflit. Rappelons que nous attendons toujours que les paquets de sanctions contre la Russie aient un effet quelconque sur l’économie russe. Je crains que nous n’attendions longtemps, d’autant qu’étrangement ce protectionnisme imposé de l’extérieur a en fait eu un effet très positif sur l’économie russe, celle-ci créant des productions nationales pour compenser la baisse des importations d’Europe. Ces échecs répétés n’empêchent pourtant pas l’UE et les pauvres pays européens de continuer à accroître toujours plus les sanctions. Pourtant comme le disait Einstein faire toujours la même chose et attendre un résultat différent c’est une marque de folie. Et l’on ne pourrait mieux décrire ces élites que par cette description de fou. Une folie qui n’est pas individuelle, mais qui est en réalité le produit d’une contrainte sociale collective. C’est le milieu social de nos élites qui les rend collectivement folles. Un individu faisant partie de ces élites étant immédiatement exclues si par malheur il ose soulever la question de la validité des politiques appliquées.
Comme je l’ai dit, cela ne s’arrête pas à la question ukrainienne. Les macronistes n’acceptent simplement pas les conséquences de leurs propres politiques. Aucun d’entre eux n’assume l’explosion de la dette. Emmanuel Macron lui-même vient de faire un discours surréaliste où il ânonne ses « vérités » comme la réindustrialisation du pays ou la baisse de chômage . Sauf que la réalité commence enfin à apparaître même dans les médias mainstreams. Il a probablement été lâché par ses anciens soutiens milliardaires qui détiennent l’essentiel de nos médias. Il n’y a jamais eu de réindustrialisation, et la baisse du chômage fut minime, le gros de la baisse se traduisant par un transfert des chômeurs de catégorie A vers les autres catégories. Les quelques emplois créés étaient de basse qualité à coup d’autoentrepreneur mal payé. Et ne parlons pas des déficits commerciaux qui ont battu des records sous Macron traduisant la forte désindustrialisation du pays.


Et tout ceci n’est guère étonnant puisque les causes qui ont conduit notre pays dans cette situation sont toujours là. Nous partageons toujours la même monnaie que les Allemands. Nous sommes toujours en régime de libre-échange et de libre circulation des capitaux. La lente dégradation de notre économie qui a été produite par ces choix ne fait que continuer. La politique de l’offre qu’a pratiquée Macron pendant ses deux mandats n’a rien inversé du tout, ces politiques ont peut-être même accéléré le phénomène. En effet, dans un cadre totalement libre en matière de capitaux et de marchandise pour quoi investir aujourd’hui en France ? Même si vous supprimez les charges sociales, comme les démagos du libéralisme le proposent parfois, le travailleur français moyen resterait non compétitif avec un bulgare, ou un roumain. Si vous êtes une entreprise rationnelle, vous utilisez donc les moyens nouveaux distribués par l’état soit par des subventions ou des baisses de charge pour délocaliser encore plus vite votre production. C’est exactement ce qui s’est passé sous Macron. Et ce n’est pas la nouvelle Twigo électrique qui sera produite en Slovénie qui va changer la donne.

À moins de conduire la France à des niveaux de rémunération tellement bas que plus personne ne pourra, ni se loger, ni consommer , il n’y a absolument aucune chance pour que ce type de politique fonctionne. À moins, comme le disait Keynes dans les années 30, que l’on ne baisse tout en même temps, tous les salaires, mais aussi tous les prix d’un même montant. Ce qui reviendrait en réalité à dévaluer, mais en faisant quelque chose de beaucoup plus compliqué à faire en pratique. Car l’état ne contrôle ni les salaires ni les prix. Ces chocs de compétitivité dont Macron a été un des champions, même si les libéraux aujourd’hui le présentent comme un gauchiste ou un communiste maintenant qu’on voit les résultats, ne pouvaient pas fonctionner. Mais comme dans le cas de l’Ukraine cela n’empêchera pas nos nihilistes de continuer sur la même voie et de présenter des politiques bien pires encore avec le prochain locataire de l’Élysée.
Eurasia Press & News